haiti
Que dire que la misère attire la misère. Déjà, Haiti était victime d'ouragans, cyclones et pluies diluviennes en 2004 puis 2008. Ils ravagèrent le pays et firent des milliers de victimes. Les survivants connaissent la misère, la faim et vivent au quotidien des difficultés qu'on ne peut imaginer sous nos climats. Ce 12 janvier 2010, un séisme détruit ce qui reste et démolit le précaire. Je ne connais pas ce pays ni même cette région du monde. Mais, travaillant dans le "social" (Pôle emploi), je voyage souvent en recevant des personnes arrivées en France par la force de la misère qui règne dans leurs pays. La plupart y rejoignent ceux déjà là en espérant y trouver une vie meilleure. Mais s'ils ne connaissent pas le dénument total ici, ils ne trouvent pas l'eldorado pour autant.
Ils s'expriment par des mots qu'ils ont appris entre eux en espérant qu'ils se feront comprendre. Ils viennent accompagnés pour être plus sûrs de se faire entendre. Ils viennent pour du travail, ils sont jeunes, vieux, malades,, des hommes seuls dans des foyers, des femmes seules avec leurs enfants. Ils viennent de tous les pays du monde les plus pauvres, d'anciennes colonies françaises francophones et d'HAITI pour certains. Ils veulent vivre ici et envoyer de l'argent à leurs familles restées au pays. Beaucoup ont travaillé au noir par des filières et quand ils ont des papiers, ils n'ont rien parce qu'ils n'étaient pas déclarés par les patrons. Elles étaient bonnes puis renvoyées, ils étaient manoeuvres dans le bâtiment puis renvoyés parce qu'ils ont eu un accident du travail. Ils étaient prof en Tunisie mais ici, ils ne sont rien. Elles étaient journalistes en Algérie mais ici, elles sont femmes de ménage...
En les recevant, je me dis que je pourrais moi aussi, un jour, devenir une immigrée, une réfugiée parce que personne n'est à l'abri de la misère qui peut s'abattre sur un pays d'où qu'elle vienne : politique, économique, géologique, climatique, écologique. Les raisons, aujourd'hui, sont nombreuses de s'inquiéter de notre avenir quand d'autres continuent de croire que les puissants, les politiques, les grands pays riches seront toujours là pour nous... les citoyens libres des nations démocratiques et qu'il ne peut rien nous arriver. Je ne vis pas dans l'angoisse quotidienne pour autant.
Simplement, tous les jours, au travail, je pense que je pourrais être à la place de celui ou celle que je ressois quelqu'ils soient, d'où qu'ils viennent. Et pour eux, je n'ai pas ou peu de solutions parce que la crise de 2008-2009 a engendré des difficultés supplémentaires que les politiques sont incapables d'endiguer.
A grand renfort de solidarité internationale affichée, aujourd'hui, on aide, on apporte le soutien mais d'ici quelques semaines on en parlera plus et d'ici quelques mois, je recevrais des Haitiens débarqués pour les plus chanceux, qui viennent chercher la survie dans un Etat qui devrait pouvoir les accueillir.
Quand j'entends les discours de mes managers qui me rabachent à longueur de communications onéreuses, de réunions de services ce qu'est mon métier et comment je dois le faire, les objectifs à atteindre, je me dis, concrètement les moyens, les outils, le temps nécessaire, ils sont où ? Suis-je naïve ou incapable ? On arriverait bien à me faire croire qu'effectivement, je suis incompétente à refouler les indésirables, les rejetés, les insoumis au système qui les broie et les met au tapis. Et encore, le tapis, dans notre pays, il peut être "confortable" pour certains mais pour combien de temps ?
Les débarassés des soucis matériels, des besoins primaires peuvent songer au bonheur, avoir des rêves, voir le psy et aller faire les soldes, programmer leurs futures vacances. Les autres songent à comment nourrir leurs enfants, les éduquer, payer le loyer quand ils ont un logement et se rendre au travail quand ils en décrochent un et ne pas tomber malade.